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Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Chers collègues,
Nous examinons aujourd’hui, pour la troisième fois, ce texte sur l’allongement du délai d’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse.
A quelques semaines des élections, dans un espace politique et médiatique saturé par les propos sexistes et nauséabonds de la droite la plus extrême, allez-vous enfin adopter une mesure phare pour les droits des femmes ?
La situation sanitaire a lourdement impacté l’accès à l’IVG pour toutes les femmes.
De nombreuses raisons expliquent la baisse significative des avortements en temps de confinement : la fermeture physique des structures d’accueil, la peur de sortir de chez soi, la profusion de fausses informations sur le sujet via les sites internet pro-vie…
Encore aujourd’hui, malgré le travail de terrain de nombreux professionnels, l’IVG demeure un tabou. La situation de confinement a mis en lumière la nécessaire discrétion qui entoure cet acte médical.
Le travail et l’école sont les deux motifs utilisés par les femmes pour parvenir à avorter en toute discrétion. L’absence de ces deux activités ont mis en péril leur projet. Elles sont alors sorties du cadre légal des 12 semaines de grossesse. Les chiffres sont alarmants : le numéro vert du planning familial enregistre une hausse de 184% des demandes d’interruption au-delà de 12 semaines.
La demande des associations et de nombreux professionnels de santé est simple : rallonger le délai d’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse.
L’allongement de ce délai se calque sur la technique d’avortement utilisée. A 12 ou 14 semaines de grossesse, il est encore possible de procéder à un avortement par aspiration.
Sans cette mesure d’urgence, certains médecins se retrouveront dans l’illégalité pour faire face à cette détresse.
Rappelons que beaucoup de demande d’IVG après le délai légal de 12 semaines de grossesse concerne les femmes victimes de violences. Elles sont souvent dans des situations conjugales ou administratives complexes. L’allongement des délais d’IVG permet également d’éviter de creuser les inégalités sociales entre les femmes : aller faire une IVG à l’étranger coûte 3 à 5 fois plus cher pour les femmes qui ne peuvent la faire en France
Le risque majeur est que les femmes pratiquent leur avortement seules. Ce retour aux années 1970 soulève une problématique sanitaire de grande ampleur. Les femmes, qui veulent avorter, trouvent des solutions, parfois au prix de leur santé et de leur vie : achat de pilules abortives sur internet, pratiques de gestes désespérés (prise de médicaments, se frapper le ventre…). Rappelons-le, absolument personne ne peut contraindre une femme qui refuse de donner naissance.
L’avortement est une intervention médicale urgente. La remise en cause de l’IVG n’est ni plus ni moins que la remise en cause des droits des femmes.
Une fois encore, nous constatons que les droits sexuels et reproductifs des femmes ne sont pas considérés comme des droits fondamentaux.
Nous avons également demandé par voie d’amendement de supprimer la clause de conscience spécifique à l’avortement. Chaque médecin bénéficie d’une clause de conscience générale qui lui permet de refuser de pratiquer tout acte médical. En plus de cette dernière, et depuis la promulgation de la loi Veil, chaque médecin bénéficie en plus d’une clause de conscience spécifique qui lui permet de refuser de pratiquer une intervention volontaire de grossesse.
Nous affirmons que rien ne justifie le maintien de cette clause de conscience spécifique, qui continue de faire de l’IVG un droit à part.
Cette clause de conscience spécifique constitue une entorse au principe de neutralité du service public. C’est aussi la manifestation du terrain cédé à la morale par le droit et plus généralement, le peu d’intérêt juridique porté aux droits des femmes.
La suppression de cette clause permettrait également à la France de se conformer à la recommandation n°24 du Comité sur l’élimination des discriminations à l’égard des femmes qui souligne la nécessité, lorsque des professionnels refusent de pratiquer des actes concernant la reproduction allant à l’encontre de leurs convictions, de faire en sorte que les femmes soient adressées à des confrères
Cette proposition de loi est à la fois sérieuse et réaliste. Elle est soutenue par bon nombre de médecins en relation directe avec le public concerné.
Nous voterons pour cette loi de défense des droits des femmes.