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Une crise est le meilleur moyen pour les néolibéraux de rétablir la discipline dans les rangs des travailleurs.ses !
Bruno Le Maire et le gouverneur de la Banque de France le disaient avant même la fin du premier confinement : des « efforts » seront demandé à la population. Et le patron du Medef d’ajouter qu’il faudra notamment « réfléchir à la question du temps de travail ». Des efforts qui passent ainsi par l’inlassable remise en question par les néolibéraux des minimas sociaux ou des quelques normes encore protectrices des salariés dans le code du travail.
La France compte désormais 2,7 millions de chômeurs, soit 9% de la population active. Entre juillet et septembre, l’Insee dénombre 628 000 demandeurs d’emploi supplémentaires.
Les chiffres du chômage sont déjà manifestes, mais il semble que cela ne soit rien par rapport à ce qui nous attend l’année prochaine, quand les vraies retombées de la crise seront plus observables. Pratique d’ailleurs que le gouvernement ait décidé de ne plus commenter les chiffres du chômage depuis le début du quinquennat…
Et l’augmentation de la pauvreté est dramatique : depuis mi-mars, le Secours Populaire a enregistré une hausse de 45 % de nouveaux demandeurs d’aide alimentaire. La France compte désormais 300 000 sans-abris. C’est un million de Français supplémentaires qui ont basculé dans la pauvreté avec la crise du Covid19. Ils s’ajoutent aux 9,3 millions de personnes qui vivaient déjà sous le seuil de pauvreté. C’est donc désormais près de 1/6 ème de la population française qui a besoin de l’aide alimentaire pour vivre. Et la situation va continuer de se dégrader…
Depuis des années, le droit au chômage dérange les néolibéraux qui s’acharnent ainsi à décrier et stigmatiser ceux qui en bénéficient. Les chômeurs, dépeints comme les responsables de nombreux maux dans notre société, seraient des fainéants, paresseux, roublard, abusant d’un système trop généreux.…
Le régime d’assurance chômage créé en décembre 1958 est pourtant un droit, un dû pour lequel les travailleurs cotisent. Il est ainsi institué que les travailleurs ayant perdu leur emploi y ait accès. Il ne s’agit donc ni de charité, ni d’assistance mais d’une solidarité collective. Pourtant des années à nous assener que « le droit au chômage n’incite pas à la reprise d’emplois » ont bien réussi à persuader un certain nombre du contraire.
Et pourtant non seulement aucune enquête n’a pu prouver qu’une faible indemnisation était plus plus propice à retrouver un travail mais pire encore cela cache combien l’aggravation de la pauvreté et l’accélération des inégalités sont des freins au développement économique.
Pour rappel, en 2019 seulement 40 % de l’ensemble des inscrits à Pôle Emploi sont indemnisés. Et en ce qui concerne le niveau de leur indemnisation, 50% des chômeurs indemnisés touchent une allocation de moins de 1500€ net par mois.
Mais ça le gouvernement n’en parle pas, parce que la rhétorique de culpabilisation des chômeurs sert davantage son idéologie néolibérale qui aime à user du chantage à un chômage amoindri comme d’un « aiguillon de l’effort » pour les salariés, afin d’entretenir la peur qui rendra parfaitement docile au travail ceux qui ont la « chance » d’en avoir un. La réforme de l’assurance chômage du quinquennat Macron s’inscrit parfaitement dans cet visée.
Sa mise en place se fait en deux temps : en novembre 2019, les premières mesures prévues par la réforme sont entrées en vigueur, il s’agit de la mise en place de nouveaux critères d’accès, parmi lesquels la durée minimale de travail pour accéder à l’assurance chômage. Le second volet de la réforme, qui devait normalement entré en vigueur en septembre 2020, a été repoussé à avril 2021 à cause de la crise sanitaire. Celui-ci concerne notamment le changement du mode de calcul de l’allocation chômage. Changement qui serait délétère pour des centaines de milliers de gens.
Par cette réforme, le gouvernement promet une assurance chômage « plus juste ». Evidemment il n’en est rien. Décryptons les modifications qu’elle induit :
Modification de la durée minimale de travail pour accéder à l’assurance-chômage. Avant la réforme, 4 mois de travail sur les 28 derniers mois suffisaient pour ouvrir des droits à l’allocation chômage d’aide au retour à l’emploi. Désormais, la réforme exige au moins 6 mois de travail sur les 24 mois précédant la fin du dernier contrat. Cette modification a le mérite de ne pas cacher ce qu’elle est véritablement : un durcissement de l’accès à l’allocation chômage ! Le rapport de l’Unedic de mai 2020 fait ainsi état de « 20 000 rejets d’ouvertures de droit par mois pour cause d’affiliation insuffisante ». Depuis la mise en place de cette mesure, ce sont donc 6 chômeurs sur 10 qui ne sont pas indemnisés.
Nouveau mode de calcul des indemnités. Cette modification est l’application concrète du principe « à travail égal, allocation égale » : le salaire journalier de référence qui détermine le montant de l’allocation chômage ne sera plus calculé en divisant les revenus par les seuls jours travaillés au sein de la période d’affiliation, comme c’est le cas actuellement, mais par le nombre total de jours travaillés ET chômés entre le premier et le dernier contrat pris en compte. Une mesure qui va dangereusement amoindrir le montant des allocations. Pour les intermittents de l’emploi par exemple, qui sont extrêmement précaires parce que leurs métiers imposent la succession de contrats courts, cela pourrait baisser de 50% leur allocation !
A travers cette réforme, le gouvernement marque bien son mépris pour cette main d’oeuvre qui ne participe pas à la production effrénée d’une croissance érigée en totem. Il met tout en oeuvre pour forcer au retour à l’emploi. Emploi pour lequel il suffirait de traverser la rue pour le trouver. Les conséquences de la nouvelle assurance-chômage vont pourtant être mortifères : le durcissement de l’accès à l’allocation chômage impactera négative 710 000 personnes en année pleine, et la modification du calcul du salaire journalier de référence 850 000 personnes. Pour les 400 000 demandeurs d’emploi les plus impactés, l’allocation mensuelle nette moyenne passerait de 890 à 535 euros, soit une baisse de près de 40 %.
Un seul objectif donc : affamer les chômeurs pour qu’ils acceptent n’importe quel travail, même les plus mal payés. Une main d’oeuvre plus docile, terrifiée à l’idée de perdre son emploi… c’est bien ça l’ambition de cette réforme !
Or on voit comme le filet de sécurité que représente le chômage est essentiel, en ce moment particulièrement. Si le chômage partiel n’avait pas été mis en place, ce sont des centaines de milliers de français supplémentaires qui seraient tombés dans la pauvreté. Avec cette réforme c’est le risque que le gouvernement semble prêt à prendre. Si nous pérennisons la logique aberrante selon laquelle de faibles droits au chômage inciteraient les demandeurs d’emplois à retrouver un travail nous allons droit dans le mur. Cette réforme s’appuie sur des mythes, ses effets seront eux dramatiques, il faut son abandon pur et simple !