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Monsieur le Président,
Monsieur le ministre,
Chers collègues,
Monsieur le Ministre, votre projet de loi n’est pas à la hauteur…
…de l’attente, de l’espoir et de la mobilisation des anciens jeunes de l’ASE qui avait placé en vous leur dernier espoir. Après l’immense déception suscitée par la proposition de loi visant à généraliser le contrat jeune majeur, c’était pour ces associations l’occasion d’entériner dans la loi des droits réels pour les enfants et jeunes anciens de l’ASE. Pourtant, la généralisation des contrats jeunes majeurs a été refusée. Cette mesure fait l’unanimité chez les professionnels de la protection de l’enfance et chez les anciens enfants confiés. Les études le prouvent, les chiffres sont alarmants : les sorties sèches sont à l’origine de drames humains.
Votre projet de loi n’est pas la hauteur
car il ne coûte pas un euro à l’Etat. Protéger les enfants représente un coût, nécessite des moyens humains et financiers. Votre texte n’évoque à aucun moment la notion de prévention de l’enfance en danger et le manque de moyens pour assurer ces missions (PMI, action sociale, prévention spécialisée, pédopsychiatrie..).
Pourtant l’aide sociale à l’enfance est à bout de souffle : familles d’accueil surchargées, pénurie d’assistantes familiales, manque de moyens accordés à la justice et aux départements… Ces manques ont un impact sur la vie des enfants, sur leur bien-être et leur sécurité.
Votre projet de loi n’est pas à la hauteur
Car il ne prend pas au sérieux les risques humains du placement hôtelier.
Sur ce sujet, la CMP a aggravé le texte. L’interdiction de placement hôtelier a été présenté comme étant la mesure phare de ce projet de loi. Or l’article 3 du projet de loi n’interdit pas formellement le placement hôtelier car il crée des dérogations à l’interdiction en autorisant le placement hôtelier des enfants « pour répondre à des situations d’urgence ». Or, nous le savons, l’urgence est aujourd’hui malheureusement la norme pour le placement d’enfants. Les départements pourront donc aisément prouver « l’urgence » à placer les enfants en hôtel.
De plus, l’article ne fait aucune fois mention de l’encadrement des enfants placés en hôtel par des veilleurs de nuit et des travailleurs et travailleuses sociaux.
En définitive, cet article revient non pas à interdire le placement hôtelier mais à l’encadrer pour gérer la pénurie de places. Pour qui ? Nous le savons, pour les mineurs non accompagnés : 1/3 des MNA confiés à l’ASE sont placés en hôtel.
De plus, déjà en première lecture, nous disions nos doutes quant au délai de 12 mois donné aux collectivités territoriales pour mettre fin au placement en hôtel. Rien ne justifiait ce délai. Délai qui a d’ailleurs été doublé au Sénat et adopté par la CMP ! Les collectivités territoriales auront désormais 24 mois pour mettre fin au placement des jeunes en hôtel.
Un délai pour « laisser du temps » nous dit-on. Mais du temps pour quoi ? Pour créer de nouvelles structures d’accueil ? Du temps pour obtenir de l’Etat un engagement d’investissement dans les structures d’accueil ?
Ce délai injustifié ne peut être vu que comme une ultime provocation. Le placement en hôtel tue des enfants Monsieur le ministre. Les drames se suivent ; il faut passer aux actes !
Votre projet de loi n’est pas à la hauteur
Car il ne considère pas les assistantes familiales, pourtant premières ouvrières du bien-être et de la sécurité des enfants confiés. Ce texte n’aborde pas leurs revendications : la sécurité de l’emploi, un vrai statut de travailleuse sociale intégré dans les équipes de la protection de l’enfance et la revalorisation des indemnités d’entretien.
Enfin, votre projet de loi n’est pas à la hauteur
car il criminalise les mineurs non accompagnés
Dans un texte sur la protection des enfants figurent des mesures relevant des sujets migratoires voire sécuritaires. La généralisation de l’utilisation du fichier AEM est contraire aux droits des enfants. Nous nous y étions déjà formellement opposés lors de sa création par la loi Asile et immigration. Selon les recommandations du Comité des droits de l’enfant, les données recueillies sur les enfants ne doivent être utilisées qu’à des fins de protection de l’enfance. Ici, l’objectif affiché est de lutter contre l’immigration irrégulière, ce qui constitue un détournement de la finalité de la protection de l’enfance. Nous avions réussi en première lecture à faire adopter un amendement visant à évaluer l’efficacité du fichier AEM. Cette disposition a été supprimée par le Sénat, nous le regrettons amèrement.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ce projet de loi.