Dispositifs éducatifs pour les collégiens : intervention de Pierre Ouzoulias

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Séance publique du 9 décembre 2016 – Conseil départemental des Hauts-de-Seine

Pierre Ouzoulias est intervenu lors de la séance publique du 9 décembre 2016 pour dénoncer le manque d’ambition du Département en termes de déploiement de dispositifs éducatifs pour les collégiens. Il a rappelé que l’école constituait l’un des piliers de notre République et que ne pas la soutenir revenait à affaiblir l’ensemble de notre société.

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Le Département a les moyens de faire beaucoup plus pour l’épanouissement et l’éducation des jeunes Altoséquanais. Pourtant, il continue à mener des politiques austéritaires qui l’empêchent d’entreprendre des projets ambitieux, et notamment à destination des collégiens.

Retrouvez ci-dessous l’intervention orale de Pierre Ouzoulias :

Monsieur de Président, chers collègues,

En préambule à mon intervention j’aimerais faire quelques remarques de procédure. Tout d’abord, nous aimerions que l’examen des aides que le département apporte aux enfants et adolescents hospitalisés fassent l’objet d’une délibération spécifique et soient ainsi clairement dissociées des dispositifs dédiés aux collégiens qui procèdent d’une compétence partagée du conseil départemental.

À l’inverse, pour la bonne intelligence de nos débats, il eût été utile de ne pas dissocier l’examen des moyens consacrés aux collégiens de leur répartition dans les différents établissements, telle qu’elle est proposée dans le rapport 16.449 qui sera voté lundi, en commission permanente.

Sur le fond, le présent rapport est traditionnellement l’occasion d’une discussion sur la politique du département dans le domaine de l’éducation et je vous rappelle nos fructueux débats de l’an passé sur le maintien du Pass 92. Cette année, le hasard du calendrier met à notre disposition les résultats d’une enquête internationale, réalisée en 2015, par le Programme international pour le suivi des acquis (PISA), sur les connaissances des élèves âgés de 15 ans. Ces conclusions ne sont pas bonnes pour notre système scolaire dont les performances sont jugées médiocres. La proportion de bon ou de très bons élèves reste stable, en revanche notre éducation nationale, enquête après enquête, semble impuissante à réduire le nombre élevé de collégiens en difficulté. En 2006, 21 % des élèves avaient un seuil de compétences inférieur au niveau requis, cette proportion est de 22 % en 2015. L’enquête PISA montre avec beaucoup d’acuité que le milieu socio-économique explique, en France, plus de 20 % de la performance obtenue par les élèves de 15 ans, contre seulement 13 % pour la moyenne des pays de l’OCDE. Autrement dit, près de 40 % des élèves issus d’un milieu défavorisé sont en échec scolaire.

Longtemps, pour notre République, l’école a été un outil de promotion, un élément essentiel du pacte républicain qui donnait à tous les élèves des chances équivalentes de réussite. Aujourd’hui, non seulement elle est incapable de corriger les inégalités d’accès au savoir, mais elle fonctionne comme un amplificateur des disparités sociales. Intégrer un collège de l’éducation prioritaire réduit considérablement les chances de pouvoir obtenir ensuite un cursus de longue durée. L’école était le moteur primordial de l’ascenseur social, elle est devenue un élément du toboggan social, un des facteurs d’un système qui exclut et repousse sur les marges de notre communauté nationale les futurs citoyens déclassés.

Un candidat malheureux à votre primaire avait déclaré l’ambition d’élever notre système éducatif de dix points dans le classement PISA. Ce n’était pas un objectif irréaliste, mais on n’y parvient pas en imposant l’uniforme dans les écoles ou en modifiant les programmes d’histoire au profit d’un récit national. La Pologne a, par exemple, obtenu ce résultat, de 2000 à 2012, en faisant passer de 3 % à 5 % du produit intérieur brut les dépenses en matière éducative et en s’attaquant de façon volontariste à la résorption de la proportion des élèves en difficulté.

Le département des Hauts-de-Seine est l’un de ceux, en Île-de-France, dans lequel les disparités sociales et donc scolaires sont les plus importantes. Une nouvelle fois, nous regrettons que les moyens octroyés par le département à plusieurs collèges de l’enseignement prioritaire soient en baisse en 2017. Vous justifiez cette diminution par des améliorations de leur situation sociale. Nous, élu-e-s de terrain, ne les avons pas observées. La récente enquête de l’Insee fait apparaître, au contraire, une augmentation de la pauvreté dans ces quartiers. Dans ce domaine, comme dans d’autres, les courbes ne se sont pas inversées depuis 2008.

Nous pensons, avec les enseignants et les sociologues, que les critères utilisés par l’Éducation nationale et repris par vous pour évaluer les conditions économiques des familles d’élèves sont devenus obsolètes. Essentiellement parce qu’ils reposent sur la déclaration de la profession des parents et qu’elle ne reflète pas leur situation, quand de plus en plus d’emplois sont exercés à temps partiels subits. Il serait plus juste que la nécessaire modulation des aides du département se fasse en fonction des revenus des familles. C’est possible et nous pouvons vous aider à déterminer ces critères. Cela éviterait, par exemple, de donner pour un voyage scolaire la même somme au collège Gay-Lussac de Colombes et au collège Sainte-Marie de Neuilly-sur-Seine.

Plus globalement, nous observons que les moyens alloués à tous les dispositifs en faveur des collégiens sont en baisse d’environ 370 000 €, soit une diminution considérable d’environ 7 %. Avec le gel des dotations des établissements depuis 2012, c’est un nouveau signal négatif que vous envoyez à la communauté éducative et aux parents d’élèves.

Nous pensons à l’inverse, que le département peut avoir une action déterminante, aux côtés de l’Éducation nationale, pour résorber l’échec scolaire. Pour mieux le mesurer, pour en déterminer les causes sociologiques et se donner les moyens de le résorber, nous vous proposons de constituer, avec l’Académie, les enseignants, les élu-e-s et les parents d’élèves, un observatoire de l’échec scolaire. Le bilan qui lui serait demandé serait un premier pas vers un changement de paradigme qu’il est essentiel d’engager maintenant.

Notre département peut intervenir dans ce domaine, il doit se donner les moyens d’une politique volontariste et ambitieuse.