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1/ Intervention générale
Je tiens d’abord à dire tout mon soutien à l’ensemble des stylos rouges mobilisés depuis des semaines pour restaurer un service public d’éducation de qualité.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé à plusieurs reprises par voie de presse qu’il n’y aurait pas de grande loi Blanquer.
Il s’agit à mon sens d’une habileté plus que d’une modestie. Car parler de nécessaire ajustement législatif pour ce projet de loi de 24 articles vous permet de taire sa cohérence.
Avec la réforme du lycée comme avec Parcoursup, cette loi entérine une même logique : déstructurer le cadre national de l’éducation, former des parcours d’initiés et accompagner les objectifs de CAP 2022.
Sous une apparence d’assemblage disparate, ce projet de loi a en réalité l’ambition d’une transformation libérale profonde du système éducatif.
Monsieur le ministre, vous vous réclamez de Jules Ferry mais appliquez en réalité la pensée de Luc Châtel qui affirmait que « l’Éducation nationale a moins besoin de grands soirs que de petits matins quotidiens. C’est en travaillant à bas bruit, sous les radars, que les conséquences de nos réformes seront absolument majeures. »
Les hussards noirs de la République, à qui vous demandez de la confiance, ressentent au contraire une immense défiance : suppression de poste, gel des salaires, augmentation du temps de travail, devoir de réserve hors du temps de travail, paritarisme supprimé, liberté pédagogique plus que menacée…
Cette loi permet la reprise en main de l’institution scolaire par le ministère, et le ministre à l’image de l’article 1 qui est une mesure de pression sur les professeurs, de défiance. Vous parlez là d’une exemplarité qui n’a rien d’objectif.
Il en va de même pour la suppression du CNESCO au profit d’un Conseil aux missions plus retreintes et sous contrôle total du ministère. L’indépendance n’est pas un principe de seconde zone.
Sur la déstructuration du cadre national, il est par exemple prévu à l’article 8, sous couvert d’expérimentation, que la répartition des heures d’enseignement par matière puisse être différente d’un établissement à l’autre, en fonction des moyens locaux.
L’article 17 programme la fusion des académies, ce qui va entrainer la disparition de la moitié d’entre elles, de façon à n’en laisser qu’une par région. La constitution de 13 académies, avec la fusion des 28 existantes est bel et bien un pas supplémentaire vers une régionalisation de l’Education nationale et la remise en cause des règles nationales.
Cette rupture du principe d’égalité est complétée par la création des EPLEI correspondant à la mise en place d’un enseignement à deux vitesses. Ces établissements dérogeront au socle commun éducatif et bénéficieront de financements privés. L’ensemble de ces mesures renforce la mise en place d’un parcours d’initiés pour un nombre restreint d’enfants triés sur le volet.
L’article 6 quater, consacre le concept d’école fondamentale. La décision d’ouverture de ce type d’établissement par le préfet sans qu’aucune instance de l’éducation nationale ne soit consultée empêche tout contrôle. Par ailleurs, faire intervenir des enseignants du premier degré face à des élèves relevant du second degré pose la question du respect des statuts, des programmes et de l’éventualité de recourir à ce type de dispositif par souci d’économie.
Ces différents articles nous questionnent sur l’éventuelle modification (ou suppression ?) de la carte scolaire et des zones prioritaires.
D’autre part, à une demande de revalorisation salariale et d’une élévation du niveau de qualification vous proposez la création d’une masse d’étudiants précaires, sans diplôme ni formation pédagogique, auxquels les chefs d’établissement demanderaient d’assurer des enseignements pour pallier le manque d’enseignants. Face à une situation de pénurie créée par vos propres logiques, vous tentez de la gérer et non de lutter contre.
En effet, l’article 14 prévoit que les Assistants d’éducation (AED), contractuels chargés de surveillance, soient utilisés comme professeurs apprentis, enseignants à moindre coût et sans possibilité de titularisation pendant quatre ans.
Or, l’idée de pré-recrutement que nous défendons, ne peut être effective sans moyens et nécessite la création d’un statut de fonctionnaire-stagiaire. Ce statut pourrait être accordé dès la licence à des étudiants ayant l’objectif de passer un concours de l’enseignement et s’engageant à travailler pendant au moins cinq ans pour l’État après le passage du concours.
Cette loi, comme les 2 600 suppressions de postes d’enseignants dans les lycées et collèges, répond plus aux injonctions du Comité d’action publique 2022 qu’aux exigences d’égalité si nécessaire à une société émancipatrice.
Enfin, ce projet de loi ne soulève à aucun moment la problématique de l’école inclusive alors même que c’était une promesse du ministre Blanquer d’intégrer ce thème dans ce projet de loi.
Le groupe communiste votera résolument contre ce projet de loi.